◊ Le fantastique

 

Le fantastique                    

 

Un peu d’histoire

Le récit fantastique apparaît en France au XVIIème sièclealors que les philosophes des Lumières se battent pour le triomphe de la raison. J. Cazotte (1719-1792) est l’initiateur du genre avec Le diable amoureux : Biondetta est-elle une charmante jeune fille ou le diable en personne ?

Au début du XIXème siècle, le récit fantastique connaît un véritable essor dans toute la littérature européenne sous la forme privilégiée du conte et de la nouvelle.  Lié aux premières études sur la folie, il exprime un mouvement de révolte contre le rationalisme qui prétend tout expliquer par la raison.  Nodier, Balzac, Gautier, Mérimée, Villers de L’Isle-Adam, Maupassant y trouvent une source d’inspiration déterminante.  

Au XXème siècle, le récit fantastique prend un nouvel élan avec les interrogations de l’homme sur la condition humaine ; les écrivains y expriment leur univers intérieur (Kafka, Buzzati).  Le genre s’oriente également vers l’heroïc fantasy, sorte de récit merveilleux qui revoit à l’origine de l’humanité (l’écrivain anglaisTolkien, Le Seigneur des anneaux, 1966) ; ou bien il dévie vers des récits de terreur et d’épouvante (l’écrivain américain Stephen King).

 

Le fantastique, le merveilleux et la science-fiction

Le fantastique

La littérature fantastique relève de la fiction, ce qui signifie que l’auteur et le lecteur savent que les événements racontés sont imaginaires.

Le fantastique est l’intrusion du surnaturel dans un cadre réaliste, autrement dit l’apparition de faits inexpliqués et théoriquement inexplicables dans un contexte connu du lecteur.

Le lecteur hésite alors entre une explication rationnelle des événements et une explication surnaturelle, entre le surnaturel et le naturel, le possible ou l'impossible et parfois entre le logique et l'illogique. Cette hésitation est également ressentie par un personnage dont le lecteur devient le relais. Tous deux doutent.

Pour reprendre les paroles de Thomas Owen, auteur fantastique, « le fantastique est la présence inattendue de l'insolite dans le quotidien »

L’intention du fantastique réside dans cette volonté de l’auteur de créer une situation de malaise. C’est le genre de l’étrange et de l’inquiétant car nous sommes toujours dans le doute, nous ne pouvons pas comprendre totalement ce qui se passe et nous n’aurons pas toutes les réponses.

Le merveilleux  

C’est le genre de la magie, de la féérie, du surnaturel, des contes de fées. Le surnaturel y est présent mais il est expliqué, on sait d’emblée par « il était une fois » que l’on plonge dans un monde inventé de toutes pièces à côté du nôtre. Le conte de fée cherche par essence à rassurer et les fées font partie naturellement d’un autre univers que le nôtre. Le merveilleux semble aller de soi et ne provoque aucune surprise.

Le merveilleux est un surnaturel sans mystère. Le fantastique est un surnaturel mystérieux.

Il s’agit d’un univers non effrayant et moral. En effet, les notions de Bien et de Mal y sont clairement déterminées et les « mauvais » sont toujours punis.

La science-fiction

Elle envisage un certain nombre de possibilités qui semblent fantastiques et qui sont tour à tour proches ou lointaines. Elle ne s’intéresse pas au monde tel qu’il est mais au monde tel qu’il peut être, tel qu’il pourrait être, tel qu’il sera. Le monde qu’elle invente n’est pas le surnaturel mais la projection de notre monde dans le futur.

La science-fiction est au premier chef le foyer poétique des hypothèses. Elle permet à l’homme de réaliser ses désirs encore inassouvis par le progrès technique : conquérir l’espace, remonter le temps, vaincre la mort.

Comme le fantastique tente de répondre aux questions de l’homme face à l’au-delà, la science fiction est l’occasion d’imaginer et d’interroger l’avenir de l’humanité, de réfléchir aux risques qu’il représente.

Les œuvres de science-fiction permettent d’extérioriser certaines angoisses contemporaines de l’homme (ex. : angoisse atomique, peur d’une catastrophe écologique, puissance technologique des machines,...)

Comment distinguer le fantastique du merveilleux ?

Dans le récit merveilleux, le critère d’irréalité est accepté au départ. Le récit commence souvent par « il était une fois » et les personnages féeriques sont considérés sans étonnement parce que le lecteur sait qu’il est plongé dans un monde complètement différent (comme dans Harry Potter par exemple). Dans ce genre littéraire, la conclusion est souvent satisfaisante pour le lecteur et les personnages (souvent cela se termine bien). Dans le fantastique, ce n’est généralement pas le cas car la situation finale n’est pas vraiment la même que la situation initiale : quelque chose a changé.

Ce qui distingue radicalement l’être fantastique de l’être merveilleux, le récit fantastique du récit merveilleux, c’est la peur. Le fantastique est effrayant alors que le merveilleux ne l’est que par instants et jamais de manière définitive.

Comment le distinguer de la science-fiction ?

Le genre de la science-fiction se distingue nettement de la littérature fantastique car il propose un univers imaginaire, qui n'est pas ancré dans une réalité qui peu à peu bascule dans le surnaturel. Dès le début, le lecteur sait (comme dans le conte de fées) à quoi il s'attend. Il est plongé d'emblée dans un univers futuriste basé sur des découvertes scientifiques. Il s’agit généralement d’une projection dans le temps tandis que le fantastique se déroule ici et maintenant.

A aucun moment le doute ne surgit; l'hésitation entre l'interprétation réaliste et l'interprétation surnaturelle (qui est propre au fantastique) n'est pas possible.

Tableau récapitulatif :

Le merveilleux

Le fantastique

La science-fiction

Monde irréel

Monde réel

Monde futur (souvent)

Événements que l’on ne rencontre pas dans la réalité, et qui s’expliquent selon les lois du monde imaginaire. Ils ne provoquent aucune peur parce qu’ils surviennent dans un monde fondamentalement différent du nôtre.

Événements inexplicables, incompatibles avec les lois de notre monde.

Evénements effrayants, dangereux et douloureux (transforme le monde en cauchemar et provoque la peur).

Evénements qui s’expliquent par des lois scientifiques, des innovations techniques.

Evénements qui ne provoquent pas la peur parce qu’ils sont explicables.

Cf. « il était une fois » ; « Alice au pays des Merveilles » ; « Labyrinth » ; dessins animés Walt Disney

« Le fantastique, c’est l’hésitation éprouvée par un être qui ne connaît que les lois naturelles, face à un événement en apparence surnaturel ».

Cf. « L’armée des 12 singes » ; « E.T. » ; « Alien ».